Les Sans-Visage

Bien au fond de la forêt, une silhouette vêtue de paille danse joyeusement en jouant d'un instrument de musique. Tenant l'objet de coté, c'est les paupières closes que l'enfant des Bois Perdus pose ses lèvres sur l'instrument à vent.
Après quoi, ses jambes s'agitent d'elle même au rythme de la musique joyeuse et éclatante de vie, vêtue modestement d'un épais chapeau de paille tenue par des laines sur le haut, le Skull Kid ne cesse de jouer en espérant peut-être attirer les curieux et imprudents Kokiri qui aurait l'audace de s'aventurer dans sa forêt, celle de sa nouvelle famille que sont tout les enfants qui un jour de malheur, se sont perdus dans la pénombre et le labyrinthe du lieu tant redouté.

Ce Skull Kid se nomme Delan, enfin. C'est le nom qu'il s'est donné après avoir renié le sien en même temps que ses origines Kokiri, car oui. Comme la plupart des enfants perdus des Bois, Delan était un kokiri comme tout les autres avant de se perdre et de devenir ce monstre noir que tout les voyageurs redoutent un jour de croiser.
D'ailleurs, il porte encore quelques pièces de sa tunique témoignant de son passé.

Plusieurs minutes après sa partition de flûte improvisé, Delan s'assied sur la souche d'arbre et regarde le bout de tissu vert dans ses mains.

-J'aimerais tellement retrouver un visage. Depuis combien d'années exactement suis-je devenu un maudit je ne sais plus .. Je n'arrive plus à percevoir les mélodies de Saria.

Soupirant de lassitude, Delan serre fort le morceau de tissu de ses doigts fins comme des branches d'arbres et le jette ensuite violemment vers le sol. Il se releve et regarde le ciel de ses yeux jaunes et vides, et hurle de toute sa voix sa pronfonde tristesse et rancoeur :

-Vénérable Arbre Mojo ! Pourquoi m'avoir abandonné à un sort aussi triste qu'est le mien ?! Vous et vos enfant, vous deviendrez tous comme moi, je maudis vos soeurs et vos frères, je détruirais les bourgeons que vous oserez semés ici !!! Un jour, j'entendais encore le son de Saria et je sortirais des Bois Perdus !


Mais en attendant ce qui pourrait ne jamais arriver, Delan continuait de jouer, encore et toujours pour attirer les aventuriers.


Plusieurs semaines plus tard, alors que la scène se répétait et que Delan jouait de sa flûte au dessus d'un lac. Un homme aux oreilles longues et décoré des couleurs du royaume d'Hyrule et du symbole de la Triforce s'arrête juste devant lui, le chevalier semblait essoufflé, épuisé et surtout, il tournait rapidement la tête de gauche à droite, courait vers les ponts en tronc d'arbre creux pour quelques minutes plus tard, revenir devant Delan.
Notre lutin des forêt, amusée de voir la panique et la crainte de ne jamais retrouver dans le coeur de l'Hylien apporta alors sa flûte de bois jusqu'à ses lèvres. Ce qui captiva l'attention du chevalier :

-Un barde, ici ? Hum, mais vous semblez être un des habitants de la forêt ! Quel chance, vous allez pouvoir m'aider.

Delan inclina sa tête, fixant de ses deux yeux jaunes l'Hylien.

-Aider ? Pourquoi le devrais-je, durant des décennies j'ai appelé à l'aide, et pourtant personne n'est venu m'aider, moi.

Il laissa quelques secondes de silence, durant lesquelles l'envoyé d'Hyrule devait sans aucun doute prier intérieurement pour trouver une solution capable de convaincre le Skull Kid.
Mais Delan l'empêchait de penser, et continuait de jouer de sa flûte tout en agitant ses jambes de droite à gauche, un oeil discret sur son interlocteur.

-C'est important ! Je dois impérativement porter un message au peuple Kokiri de la part de notre princesse, Zelda !

"Kokiri", ce mot résonnait dans sa tête aussi fort que le gong frappant la cloche d'une église toute les heures, tout le monde s'en soucie, des Kokiri, mais qui, qui s'interesse aux autres ?! Hein ! ... Alors Delan s'arrêta de jouer et releva son chapeau de paille, dévoilant son obscure malédiction.

-Si c'est important alors ..

Le Skull Kid fit un bond agile pour éviter de mettre les pieds dans l'eau du lac et s'avança doucement vers le chevalier, rangeant sa flûte et affichant un sourire vicieux.

-Alors je vais t'aider, envoyé de dame Zelda. Les Kokiri ne sont plus très loin ! Suis-moi.

Le chevalier hocha la tête, rassuré d'avoir trouvé un guide pour le sortir d'ici, si seulement il savait.

Après de longues heures de marches, c'est les bras vers le sol que l'Hylien marchait :

-Est-ce que nous sommes bientôt arriver ? Tu m'avais dit que les Kokiri n'étaient plus très loin.

Soufflant, le front dégoulinant de sueur. Le chevalier était désormais très diminué.

-Cesse donc un peu de geindre ! Ne te fait pas de souci et fait moi confiance, tu n'en as plus pour très longtemps.

Effectivement, c'était le cas de le dire. l'Hylien clignait des yeux en suivant les pas du Skull Kid, et alors qu'il fermait les paupières un petit plus longtemps que prévu, le Skull Kid n'était plus devant lui. Il avait comme disparu, et l'esprit du soldat tourbillonnait comme une ruche attaqué par un ours affamé, hantée par des questions qui n'auraient pour lui bientôt plus d'intêret.
La voix du lutin des forêt se mit à retentir dans la forêt qui devenait de plus en plus sombre :

-Tu vois ? Hihihi ! Tu n'en as plus pour très longtemps !

Et d'un claquement de doigts de la part du lutin des doigts, la forêt s'illumina et deux affreuses plantes carnivores firent face à l'Hylien :

-Noooon ! Pourquoi ?! Arrgh .... AAAAAH !!!

Les deux plantes attrapèrent chacun un des bras du chevalier, mordant dans les mailles et lui fracassant les os jusqu'à ce qu'il craque comme du bois.
Delan descendit de l'arbre sur lequel il s'était caché, et s'approche du soldat mourant :

-Pourquoi ?

Il inclina sa tête sur le coté, un grand sourire aux lèvres et ses yeux jaunes perçant l'âme du pauvre soldat.

-Tu foulais le sol de ma forêt, sans ma permission. En plus, je n'aime pas du tout ton visage d'adulte hautain et barbare, mais je suis quelqu'un d'aimable. Alors avant de rejoindre les cieux, je vais te jouer un petit air que j'aime beaucoup !

Et enfin, tenant sa flûte de coté. Delan se mit à danser en soufflant un air dans sa flûte, avec pour accompagnement les cris d'agonies du guerrier avant qu'il ne ferme les yeux à jamais.