Le retour à la Paix

La race des elfes -peuple inconnu d'Hyrule comme de Termina, et pourtant tellement proche de la race Hylienne- est connue sur le lointain continent de Krynn comme étant la race ayant l'espérance de vie la plus vieille qui soit, c'est-à-dire de plusieurs siècles.

Fort heureusement pour Light Majere, son destin n'était pas de mourir à neuf-cents ans. Pourquoi "fort heureusement" ? Nous allons le voir dans les paragraphes qui suivent.
Le demi-elfe, jusque-là d'un âge inconnu, offrit sa vie contre le pouvoir durant ce que l'on appellera par la suite la Grande Bataille d'Assilfenn.
Nourri par le besoin d'aider son pays d'origine, le mage était arrivé sur Termina en quête de pouvoir, il y'a cinq années de cela. Il avait déjà réussi en partie en obtenant quelques artefacts puissants et uniques, mais cela n'avait jamais suffi à sauver les siens. C'est ainsi qu'aux côtés de Ranskaa -qui n'avait rien demandé-, Light se vit offrir le pouvoir dont il rêvait tant, en échange de la plus grande partie de sa vie restante.
Cela ne se produisit que le temps d'une sieste, il n'y eut aucune lumière, aucune secousse, pas un seul rayon d'énergie cosmique montrant à tous qu'il était en train de se produire un pseudo-miracle. Non, simplement, le physique de Light et de Ranskaa se flétrit instantanément, laissant place à deux vieillards à l'aspect qu'ils n'auraient jamais dû avoir en cette année, en ce jour, à cette heure précise.

Naïf qu'il était, Light crut l'espace de quelques heures que cette seule transformation était le coût de sa nouvelle force. Ce fut sans aucun doute la plus grande erreur de sa vie.
Son esprit et son corps n'étaient prêts en aucun cas à recevoir pareils changements. Sentant son existence à deux doigts de se briser, il ne put réagir qu'en se dématérialisant dans le monde de la lumière qu'il connaissait tant, là où il avait toujours pris l'habitude d'aller pour se régénérer. Cette solution de facilité ne plut pas aux déesses. Songeant qu'il était l'heure, elles matérialisèrent Light Majere dans un lieu sans nom, que l'on pourrait nommer Abysses, Limbes... ou peut-être même sanctuaire des dieux. Peu importe ce qu'il en était au final, les Déesses apprirent au mage qu'il se trouvait dans une partie du Saint Royaume.

- Le pacte que tu as signé est contre-nature, jeune mortel, commença l'une des trois voix divines. Nous ne pouvons te laisser continuer ton périple comme tel.

Face à la toute beauté des déesses qu'il ne voyait pourtant pas, le mage resta incliné dans un silence empli de respect durant toute l'apparition des divinités d'Hyrule. C'était ça, la puissance des Dieux, ce ressenti impossible à décrire qui vous faisait fléchir que vous le vouliez ou non.

- Ta punition sera de rester méditer ici, et ce autant de temps que les années que tu aurais dû vivre. Tu pourras voir ce qu'il se passe dans le monde sans agir durant tout ce temps. Puis, nous te renverrons exactement au même moment que lorsque tu es arrivé en ce lieu. Sache que plus tu observeras le futur, plus la destiné de Krynn, de Termina, ou de ta propre vie se verra sombre, ton retour dans le monde altérant forcément le futur que tu verras de toute manière.

C'est sur ces dernières paroles que débuta un silence de deux siècles.




Tard dans la nuit, un faible flash lumineux se dessina non loin d'Assilfenn.
Seule au milieu du désert, la silhouette invisible du vieillard s'écroula au sol, frappée par la beauté du monde qu'il n'avait plus vu depuis deux-cents ans. Le sable encore tiède lui caressant les mains, le vent lui chatouillant le corps, ou simplement la simple sensation de faire à nouveau partie de ce monde, de cette dimension, de cette vie lui arrachèrent un sanglot qu'il ne put dominer, même après tout ce temps de réflexion et de méditation.

La nuit passa très vite pour le demi-elfe. Beaucoup trop vite. Bien que son corps se fit vieux, il savoura ses dons comme jamais, les utilisant essentiellement pour se déplacer et atteindre les lieux les plus fantastiques du pays. Il y dédia sa nuit. La contemplation de la beauté, sans que cela ne lui coûte rien, à part du temps, était tout simplement magique.
Le monde était terriblement beau. Combien de gens passaient près du lac Hylia sans même lui prêter le moindre regard, faute d'habitude ? Combien de villageois de Cocorico avaient oublié l'existence d'une si belle création que le Mont du Péril, juste au dessus de leur tête ? La grâce de la Lune se baignant au milieu d'une mer étoilée, cédant lentement sa place au soleil aussi ardent qu'agréable, n'était-ce point là l'un des plus beaux cadeaux des Dieux ?

L'Aube arrivait d'ailleurs quand Light se rendit compte qu'il s'était assoupi au-dessus de la grande cascade barrant le domaine Zora. Dans ses souvenirs du futur qu'il avait entrevu, les forces de Krynn seraient de retour chez elles vers le début de soirée. Le feu généré par les hommes d'Assilfenn n'aurait pas posé de problèmes aux bonnes gens de la cité de Krynn qui avaient toujours été parés à cette éventualité.
Mais quand devait rentrer Tapion ? Cela, Light ne s'en souvenait plus. Peu importe, il était temps de rentrer à la maison et de préparer une grande fête pour le retour des mages qui avaient failli donner leur vie pour la paix. Mais quelle paix ? Tapion culpabilisait d'avoir jeté Krynn dans la gueule du Loup. Pourtant le demi-elfe avait souvenir d'être à l'origine de cette erreur. Il lui faudrait s'excuser, son imbécilité n'avait fait que nourrir une guerre inutile et coûteuse en vies... à quel prix ?

Le mage se dématérialisa une nouvelle fois puis rejoint Krynn. Il était temps de réparer les dégâts, et de se préparer au futur sombre qu'il avait entre-aperçu dans le Saint Royaume.

Tapion revint seul de la cuisante défaite qu'il avait subi dans le désert. Ses troupes, parties avant lui, avaient profité de leur avance pour aider à éteindre l'incendie et à traquer les coupables. Les pyromanes, certainement des membres d'élites d'Assilfenn envoyés en représailles, s'étaient enfuis sans laisser de traces. Tapion n'avait pas rattrapé ses soldats en volant, comme si le fait de faire le trajet jusqu'à la forêt à pied allègerait son erreur. Ce n'était pas le cas, mais cela laissait le temps à l'ancien membre de l'empire de la Lumière de cogiter un peu.

La priorité était d'éviter qu'un autre incident stupide dans le genre puisse survenir : il fallait tout simplement que Tapion quitte son poste de "plus haut gradé de Krynn" et son rôle de décideur, ou désigner enfin quelqu'un au dessus de lui. Mais au fond de lui, le général savait qu'il avait agit pour ce qu'il pensait être l’intérêt de Krynn, à sa manière. Il comprit alors quel serait son rôle dans le futur de l'Ordre. Il faudrait qu'il l'explique à celui qui prendrait les commandes...

Regardant le sol défiler devant ses pas, Tapion traversa la base de l'Ordre, en direction de ses quartiers. Il sentait le regard des soldats et des habitants, il entendait les murmures à son passages, mais ne souhaitait pas savoir s'il y avait là de l’inquiétude, du respect ou de la colère. Quelqu'un s'interposa sur son chemin et les murmures se turent. Un vieillard vouté par l'age qu'il ne devrait pas avoir, Light Majere. Tapion daigna lever les yeux vers l'homme qui lui avait évité de tout gâcher et de sacrifier l'Ordre pour une cause perdue et insignifiante.

- Ces femmes et ces hommes m'ont fait trop confiance, et là est le danger puisque je n'ai pas su assurer leur sécurité. Je ne dois plus commander l'Ordre. Toi seul parmi nous a la force et la sagesse pour diriger Krynn. Le peuple croit plus que jamais en ta personne. Dorénavant nous nous en remettrons à toi.

Et il contourna Light, sans lui laisser le temps de répondre. Pourquoi faire ? C'était à l'évidence la meilleur solution, et Light lui-même devait sûrement le savoir. Tout autour, les observateurs digéraient les paroles du général, et les conversations reprirent de plus belle. Tapion gagna alors ses appartements en attendant que les choses de tassent. Selon ses calculs, il faudrait bien 30 min pour que la nouvelle se propage dans toute la base, et 1 heure de plus pour que Light deviennent officiellement l'empereur ou le dirigeant de Krynn. Il ressortirait donc pour lui parler dans 1h30. Tapion n'aimait pas toutes les formalités administratives et les cérémonies protocolaires...

Lorsque le demi-elfe rentra pour la première fois chez les siens depuis deux-cents ans, les mages guerriers étaient déjà de retour. Tous sauf Tapion.
Avant de rentrer dans la Cité, il ne put s'empêcher de pleurer une nouvelle fois, à la vue de toute cette civilisation vivante, en chair et en os. Pourtant le coeur n'était pas à la fête à Krynn. Light dû se remémorer les évènements avant sa disparition, en essayant de ne pas mélanger le futur alternatif qu'il avait vu avec ce qu'il avait réellement vécu.

Effectivement, les mages avaient été contraints de retourner à Krynn, Tapion se sacrifiant pour l'Ordre. L'alerte avait été donnée concernant l'attaque de la forêt, obligeant les mages à retourner au plus vite à Krynn en cas de plus gros danger. Personne à ici ne connaissait encore la chute de la guerre, tant que Tapion n'arriverait. Il rentrerait lentement, et annoncerait la fin de la guerre aux siens d'une façon tellement sombre que cela suffirait à affliger les habitants de la Cité. Dans ses souvenirs du "futur", l'Ordre de Krynn se souviendrait de ce jour comme d'une défaite, affaiblissant Krynn par la suite. C'était le moment d'intervenir dans l'Histoire.

Light savait que pour tout le monde, il n'avait disparu que l'espace d'une journée tout au plus. Il lui faudrait faire comme s'il avait quitté l'armée de l'Ordre la veille...
Il s'avança sur la place centrale de la Cité, place désormais pratiquement achevée depuis leur arrivée dans les bois.

- Mes amis. Venez, s'il vous plait, rejoignez-moi, j'ai à vous parler. Et qu'on m'apporte mon bâton je vous prie.

Le vieillard s'assit sur une roche et attendit qu'un peu de monde s'amasse autour de lui. Beaucoup se demandèrent qui était cette nouvelle tête, heureusement la plupart des guerriers partis en guerre l'avaient reconnu. On lui apporta son bâton, sur lequel il put se reposer après l'avoir contemplé quelques instants.

- Pour ceux qui ne m'auraient pas encore vu sous cette... allure, c'est bien moi, Light Majere. Il s'interrompit un instant. Mais passons, je viens vous apporter une bonne nouvelle. La guerre est terminée, la paix est de retour.

Des acclamations se firent entendre dans toute la forêt. Mais rapidement, on lui demanda l'issue de la bataille.

- Peu importe l'issue du combat, mes frères, lâcha-t-il simplement. Cette guerre était malsaine, elle nous poussait à affronter nos amis, nos familles... Krynn a eu la chance incroyable de ne connaître aucune perte, ce qui est même inconcevable dans une guerre. Et ça, vous le devez au général Tapion, qui rentrera dans quelques heures.

Suite à ça, les ovations se firent de plus belle, la gloire au nom du général Tapion retentit pendant un long moment entre les arbres. Le futur de Krynn était peut-être sauvé finalement, le résultat de la guerre n'avait pas changé, mais les mentalités étaient désormais plus constructives, plus optimistes en vue de l'avenir. Les citoyens décidèrent d'organiser une grande fête au soir, pour l'arrivée de Tapion.



Comme prédit, Tapion arriva en fin de journée. Krynn entier s'apprêtait à le recevoir en héros, l'idée étant de le saluer juste après une rapide entrevue publique avec Light. Sa réaction stupéfia les mages qui ne s'attendaient forcément pas à un visage aussi grave.

Il donna les clefs de l'Ordre à Light, et, immédiatement, s'en alla dans sa demeure. Le vieillard, habitué à prendre désormais son temps lorsqu'il s'exprimait, n'avait pas pu répondre au Général à la coupe de gros taré.

- Les jeunes, j'vous jure... impatients comme jamais !

Lorsque Tapion fut hors de portée, un des citoyens de Krynn vint demander au demi-elfe ce qu'ils devaient faire. Il leur demanda de continuer les préparatifs de la fête et du banquet. Connaissant Tapion, celui-ci ressortirait de chez lui un peu plus tard, plus apte à la conversation.

Peu de temps après, les musiciens avaient commencé à jouer, des centaines de fragiles lumières virevoltaient dans l'obscurité du crépuscule, l'odeur des nombreux mets en cuisson commençaient à en rameuter plus d'un, le bruit de la population en fête se faisait de plus en plus sonore. Mais pas de Tapion en vue.

- Les jeunes, j'vous jure... de plus en plus difficiles !

Un mage, peut-être plus affamé que les autres, commença à crier gloire au général Tapion. Son voisin suivit, puis un groupe de jeunes, jusqu'à ce que tout Krynn s'unisse dans un seul et même cri de joie :

- Gloire au Général Tapion !

Regardant par une longue fenêtre traversant la face sud du toit de sa maison, Tapion scrutait la course du soleil couchant et, tout en calculant l'heure, planifier ses projets à venir. Il avait décidé de s'employer à affirmer la puissance de l'Ordre, en passant par la sécurisation de son territoire. Il lui faudrait donc pacifier les peuplades barbares qui vivaient en bordures de la forêt. Après cela il faudrait qu'il s'assure du contrôle de la plaine de Termina. Enfin seulement, il recommencerait à regarder à l’extérieur des frontières.

En pleine réflexion, il entendit les cris caractéristiques d'un banquet, lui indiquant qu'on fêtait probablement l'intronisation de Light. Il décida de sortir un peu, pour voir les réactions et rappeler qu'il était encore là pour servir...

- Gloire au Général Tapion !

Ah, la sortie fut efficace et discrète. Mais qu'avaient donc ces inconscients à chanter ses louanges. Ne se rendaient-ils pas compte que le général avait faillit anéantir l'Ordre sur un coup de tête. Se frayant un chemin à travers la foule, et reprenant un peu de vie par le contact humain, Tapion repéra Light Majere, assis à une grande table, qui lui faisait signe de s'approcher. Dans la bonne humeur générale et au milieu de la musique, le guerrier à la coupe improbable vint s'assoir aux cotés du vieux mage. Il lui murmura alors :

-Tu ne veux donc pas prendre simplement la direction de l'Ordre?

Au même moment, un repas à base de sanglier de la forêt leur fut servi et un idiot à la voix suraigu voulu chanter une chanson avant de se prendre un pain dans la figure. Le général eut une impression de "déjà vu" mais n'en fut pas plus troublé...

L'heure était à la fête et aux rires. Ce genre de moment avait longtemps manqué au mage. Le simple plaisir de boire et manger à nouveau lui fit oublier l'espace de la soirée les nombreux tourments qui le poursuivaient depuis ses visions du futur.

Lorsque Tapion vint s'assoir à côté de lui et le questionna, Light ne répondit pas tout de suite, profitant du tintamarre particulier qu'un drôle de musicien zora venait de produire pour finir d'avaler le morceau de sanglier qu'il venait d'enfourner.

- Je n'ai pas eu le temps de vous répondre tout à l'heure, à toi et ton tempérament de feu, mon cher ami, commença-t-il en lui adressant un sourire affectueux. Je sais bien que tu te sens coupable d'avoir risqué la mort de nombreux innocents, que ce soit dans notre camps comme dans l'autre. Je voudrais te demander de ne plus culpabiliser, autant que je me souvienne... tu as dû en réalité supporter le poids de la résultante de mes erreurs.

Le général de feu parut interloqué l'espace d'un instant, mais n'en montra bientôt plus la trace, continuant d'écouter Light malgré le tumulte de la fête.

- Un jour, tu es parti de Krynn l'espace de quelques semaines afin de t'entrainer. A cette époque, mes pensées étaient corrompues par les problèmes de l'Ordre. Krynn avait besoin de rubis, sans quoi nous allions nous éteindre rapidement. C'est là qu'est arrivé le fameux Itachie, nous proposant cette idée pourtant insensée de renverser Assilfenn. Dans un premier temps je refusai, mais rapidement il me lança de nouveaux arguments, comme quoi les dirigeants n'étaient plus les mêmes, que le mal s'était emparé des forces d'Assilfenn pour résumer...

Un sourire ironique en coin, Majere continua son récit.

- Suspicieux, je lui proposai plutôt d'aller rendre visite à l'empereur Ice, craignant que la situation ne soit en réalité plus urgente qu'on ne l'aurait cru... Plus la soirée avançait, plus nos besoins me poussaient à accepter la bataille, ma conscience se disculpant sûrement derrière les dires d'Itachie à propos de la folie d'Ephraim. C'est donc sur cette dernière note que Ice m'entendit, car je vécus juste après ça la pire aventure de ma vie... finit-il en levant sa main flétrie à hauteur de leurs visages.

Dans la réalité, tout cela n'était arrivé que quelques jours avant seulement. Dans l'esprit du mage, tout était tellement vieux, tellement lointain. Son esprit hésitait sans cesse entre croire qu'il vivait dans le passé ou le présent.
Mais il ne fallait pas divaguer. Il planta son regard dans les yeux de son homologue.

- Général Tapion. Je te le dis donc, tu n'as pas à culpabiliser vis à vis du passé. Dans tous les cas, Krynn aurait participé à cette bataille, et, sans toi, peut-être qu'aucun de nos mages ne serait revenu vivant. Tu as fait le bon choix et sauvé des centaines de vies en ce jour sanglant. Tu es un héros. L'Ordre ne mérite pas mieux pour veiller sur lui, et je pense qu'il en est de l'avis général. Moi, tout ce que j'ai fait, c'est disparaitre pendant que tu te battais.

Il ne préférait pas parler tout de suite de ses nouveaux dons amplifiés, de la torture que lui venaient de lui infliger les dieux, de ses visions... s'il devait altérer le futur, il ne faudrait en aucun cas le détériorer. Tout annonce devait se faire avec minutie.

Pendant que le général et le capitaine de Krynn festoyaient, petit à petit, un no mans land se dessinait tout autour de leur table. Sans diminuer pour autant leurs activités, les membres de l'Ordre s'écartaient sensiblement, donnant à la discussion un air de réunion stratégique secrète. Ils étaient bien entendu curieux des décisions que pourraient prendre les deux leaders de Krynn, mais savaient qu'il fallait mieux leur laisser un minimum de confidentialité.

Tapion avala un morceau de viande et se retourna vers Light.

-Le problème n'est pas simplement si j'ai pris la meilleur décision. Je me suis compromis durablement, moi plus que l'Ordre, auprès des autres empires. Je ne vais pas leur inspirer de la confiance avant un bon moment, surtout du coté d'Assilfenn. C'est pourquoi mon rôle dans l'ordre doit être revu, et ta propre position revalorisée. Néanmoins...

Il arrivait à la partie qui lui plaisait. Ce à quoi il avait médité après sa décision de rester se battre dans le désert aux cotés d'Itachie et pendant son long retour. Cela ne représentait qu'une infime seconde, comparé à ce qu'avait pu vivre Light, mais Tapion pensait s'être un peu approché de la compréhension du fonctionnement d'un empire. Et dans cette mécanique complexe, il pensait avoir trouvé les engrenages qui lui convenaient le mieux.

-Je ne regrette pas complètement mes actes, car je sais que j'ai agi pour la grandeur de l'Ordre. J'ai conscience qu'il est fondamental d'assurer la sécurité des habitants et de défendre nos idéaux, mais nous n'obtiendront pas l'influence et le pouvoir de les défendre en restant gentiment planqués dans notre forêt. Nous nous feront marcher dessus par les autres s'ils ne nous craignent pas et si ils pensent que nous n'avons qu'une petite force diplomatique. Notre but est de nous tenir dans la lumière de ce monde et de rayonner, tant par notre pouvoir que par nos valeurs.

A ces mots il pris une frite entre deux doigts pour illustrer son propos. Il la leva légèrement et elle fut éclairée d'une lueur rouge par le soleil couchant qui perçait par les feuillages.

-Tu es celui qui incarne le mieux les idéaux de l'Ordre et tu es reconnu comme étant plus sage que moi. Tu seras donc ce coté lumineux. Mais tout être qui se tient dans la lumière doit projeter derrière lui une ombre, c'est une loi de l'univers.

Tapion carbonisa alors la moitié à l'ombre de la frite.

-J'assumerai le poids de cette part d'ombre. Suppression de nos ennemis, conquêtes de territoires, espionnage et contre-espionnage, uniquement pour l'intérêt de l'Ordre. Pour ne pas nous mettre en danger j'ai besoin que tu t'assois sur la plus haute marche et que tu gardes un certain contrôle sur moi, pour que je ne refasse pas la même erreur qu'aujourd'hui. Mais ton statut limitera forcément tes actes, comme c'est le cas pour tous les empereurs et comme cela aurait du l'être pour moi quand je représentais Krynn. C'est là que j'interviendrai. Je serai un bras qui ne connaitra pas d'autre limite que ta volonté et ta sagesse. Cette combinaison nous assurera à la fois la puissance qui nous manque et la sécurité que je n'ai pas su défendre.

Les yeux du général Tapion était pétillant quand il engloutit finalement la frite qu'il tenait. Light, de son coté, s'était tue respectueusement pendant le monologue, mais son esprit était toujours au travail, assimilant les conclusions du guerrier.

Les membres de l'Ordre n'avaient pas entendu le discours de Tapion mais avait lu la détermination et la passion dans ces yeux, si bien que la fête battait à présent son plein.

Jamais encore Light n'avait lu autant de volonté dans le regard d'un homme. La volonté, c'est ce qui allait les sauver, du moins si les visions d'une réalité future qu'avait vu le mage étaient vraies. Il acheva son plat et se tourna entièrement vers Tapion.

- Très bien. Je vois que tu es prêt -à affronter le terrible Destin qui nous attend songea-t-il. Tu as raison, je pense également que l'heure est venue pour l'Ordre de sortir de son cocon. Notre belle Cité va rapidement se vider d'une bonne partie de ses habitants... Mais bon, je suppose qu'il n'est rien de plus normal que de voir son fils quitter la demeure lors de sa majorité sans éprouver quelque pincement au cœur que ce soit.

Il n'en dit pas plus, se leva difficilement tout en s'emparant de son bâton, puis planta son regard dans celui du Général.

- Je ne t'ai jamais remercié pour tout ce que tu avais fait pour moi. Ce jour viendra, tôt ou tard, que tu crois que ce soit déjà chose faite ou pas.

(HS : Bon j'ai un peu de mal à réfléchir ce soir donc très probable que je ne parle pas toujours bien français wesh lol mdr)
Le vieillard gagna alors une estrade qui avait été dressée là en début de soirée pour les musiciens, et invita la population à gagner le silence. Le calme vint vite, à croire que tout le monde s'attendait à ce moment depuis le début de la conversation entre le Général et le Capitaine.

- Mes amis, je profite de ce moment de partage et de retrouvailles pour vous parler de Krynn. Oui, pour vous parler de notre avenir, mais aussi, pour vous rappeler qui nous sommes vraiment. Effectivement, cela fait maintenant de nombreux mois que nous vivons en ce lieu béni des déesses. Nous avons su renaître de nos cendres mieux que quiconque, le Destin nous a fait don d'une nouvelle vie, nous avons redécouvert notre corps, notre esprit, nos sentiments et surtout pour beaucoup notre vision du monde. Le monde, c'est justement ce que nous avons peut-être abandonné depuis la fin de l'Empire de la Lumière. Nous nous sommes repliés ici, passant notre temps à développer nos nouvelles forces, nos nouveaux pouvoirs, mais à quoi cela sert-il si le monde ne peut en bénéficier ? On nous a cru morts pendant longtemps, jusqu'à ce que nous réapparitions pour quoi ? Pour une guerre ? Ne serait-ce pas là justement la pire des situations ? La Guerre peut être une bonne chose, encore faut-il qu'elle soit dédiée à une cause véritable. Mais pour l'heure, notre mission n'est pas de favoriser la guerre. Nous avons commencé à reprendre nos vies d'antan comme si nous étions toujours un empire, mais nous ne sommes plus cet empire de jadis, nous sommes désormais l'Ordre de Krynn, et nous ne devons pas perdre de vue que notre union ne fait pas de nous un peuple, mais des frères. Les forces de ce monde doivent rester en harmonie, à l'image de la Sainte Triforce, mais cette harmonie se brise de jours en jours, et ce par delà le monde. J'ai compris plus que tout que notre force est un atout majeur à mettre au service de l'équilibre du monde, au profit des uns et au détriment des autres forcément, d'où l'importance de nos choix. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons toujours accueillis les mages sombres autant que les bons, les nécromanciens comme les mages blancs.

Il prit quelques secondes pour observer les visages à portée de vue. Ce qu'il disait là ne semblait pas plaire à tout le monde.

- Laissez-moi vous rappeler que notre cité n'a pas pour but de devenir la future capitale d'une nouvelle civilisation. Ce lieu restera notre maison, mais dès demain, ceux qui n'adhèrent plus aux valeurs de l'Ordre se devront de quitter Krynn pour mener une nouvelle vie. Car autant vous dire que les jours qui viennent ne s'annoncent pas de tout repos.

Pour la première fois, il sembla au vieux mage que les avis étaient partagés au sein de la population. Ceux qui avaient commencé à vivre une vie banale à l'intérieur de la cité semblaient être les plus récalcitrants.

- Il est temps pour nous de nous mélanger au monde. Le Général Tapion et moi-même vous dévoilerons une marque qui nous permettra de nous reconnaître à l'extérieur. Pénétrez le monde, gagnez les rangs les plus élevés des autres ordres, des autres organisations, des autres guildes ! Devenez marchand, garde, artisan, mais n'oubliez jamais d'où vous venez ni qui vous servez. Car au final, servir Krynn, c'est servir le monde.

"Les détails viendront après" se dit le mage. Il était tard et le vieillard voulait se coucher. Mais alors qu'il s'apprêtait à descendre l'estrade, une voix dans la foule s'éleva en sa direction :

- Mais Capitaine, pourquoi est-ce vous qui nous dites tout ça ?!

(HS : Bon j'ai un peu bâclé la fin, mais j'voulais absolument poster ça ce soir avant de me coucher)

A cette question au vieux mage, les regards se tournèrent naturellement vers Tapion, qui s'était assis au pied de l'estrade pendant le discours. Celui-ci se releva et contempla la foule des yeux ébahis. Puis il leva le regard vers Light Majere, et déjà plusieurs personnes dans l'assistance comprirent la situation, et les mots du vioc. Le moment était venu de défendre ses causes les plus chères. Le monde bougeait, et Krynn suivait. Les rôles changeaient mais la détermination perdurait. Et le capitaine était à présent empereur...

-Propageait la nouvelle de part le monde : le mage Light Majere sera désormais le leader de l'Ordre de Krynn. Il est de loin le plus sage d'entre nous et celui qui incarne le mieux les valeurs que nous défendons, il sera notre porte-étendard. C'est l'homme que nous suivrons, puisque nous ne savions plus qui suivre.

Les yeux brillèrent, car personne ne voyait d'objections à ce que Light prenne les rennes de l'Ordre. A force de s'impliquer, il était devenu très populaire. Tapion changea alors de ton. (et de couleur, parce que jaune c'est pas terrible sur ce fond, donc je me remets au rouge^^, et c'est plus raccord)

-Mais il a raison sur toute la ligne. Nous ne sommes pas venu ici pour vivre une existence paisible, pas pour l'instant. Votre souhait, vous qui m'avez suivi hors des ruines de l'empire de la lumière, et vous qui nous avez rejoint dans cette forêt, c'est d'apporter quelque chose au monde. Un équilibre, un espoir pour tous! Maintenant, nous allons nous battre pour cela. Il est tant de respecter les engagements tacites que vous avez fait, à l'Ordre, et à vous même.

La perplexité qui avait gagné une partie des rangs de l'Ordre se changea peu à peu en détermination. Tapion avait raisons, tous, mages et guerriers, était venu pour apporter sa contribution au bien être de l'humanité, et la flamme qui somnolait en eux venait de se raviver. Le général était satisfait : il n'avait pas l'habitude de s'adresser à une foule dans ce genre de contexte, mais appréciait l'effet engendrer. Le premier empereur de Krynn observait son général et la communauté en lâchant quelques soupirs de fatigue.

A présent, le pseudo-peuple de la forêt était prêt à suivre Light dans les nouvelles épreuves qu'ils allaient affronter.

(HS : "Empereur" est peut-être un bien grand mot, on reste un "Ordre" hein !)

Tapion avait bien parlé. Son intervention avait permis de valider auprès de la communauté les instructions de Light.
Le Destin de Krynn n'était pas de rester replié dans cette forêt, à aider les autres de loin, ou de temps en temps, tout en s'enfermant dans une réalité autre que celle que connaissaient les mondes d'Hyrule et Termina. Le vioc désuet ajouta (en marron, comme toi je change de couleur vu le nouveau design...) :

- Aux vues de l'importance qu'a pris Krynn en si peu de temps, je ne pense pas qu'il soit sage de concentrer nos forces en un seul et même lieu, si protégé soit-il. Un "QG" ferait un bon point faible si l'on venait à vouloir nous nuire -ce qu'Assilfenn a déjà tenté de faire en essayant d'enflammer la forêt, je vous le rappelle.
Bien au contraire, si nous restons en contact tout en faisant partie intégrante de chaque parcelle de ce monde, c'est là que résidera notre force ! Nous resterons en constante communication avec le Monde comme avec Krynn, maintenir l'équilibre de ces terres nous sera bien plus accessible qu'en restant ici.

La majorité sembla approuver ses dires, suite à quoi le mage descendit de l'estrade et posa affectueusement une main sur l'épaule de Tapion.
Un court instant, certaines visions morbides lui vinrent à l'esprit. Il préféra chasser ses idées noires et resserrer sa paume contre l'épaule du Général.

- L'avenir de Krynn promet, mon ami. Restons fiers et ne regrettons rien, quoi qu'il arrive.

La journée suivante s'annonçait laborieuse, il valait mieux pour le vieux mage aller se coucher au plus vite.

(HS : Un petit post pour conclure le rp... à moins que t'aies quelque chose à ajouter.)