A la croisée des races [privé avec Raistlin]

Sven était seulement installé depuis quelques jours à Ikana que l’envie d’aller explorer les environs lui prit. Avec précaution, il mit son bonnet sur la tête pour ne pas qu’on aperçoive ses oreilles et enfila un long manteau qui couvrait entièrement sa longue queue immaculée. Il était fin prêt à affronter le regard des gens du village, qui ne feraient à présent plus guère attention à lui. Ce fut donc avec un léger sourire aux lèvres et serein que le neko sortit de chez lui.

Il faisait assez beau, aussi les vêtements chauds du jeune mâle ne passaient pas inaperçus. Ce fut donc très rapidement que le fils unique des Itako s’enfonça dans la vallée. Aussi lourd qu’était l’air, cela ne dérangeait pas d’un poil ( c’est le cas de le dire ^^ ) le petit Sven. En effet, son corps tout entier était imprégné du pouvoir de la glace, ce qui gardait constamment la température interne du jeune hybride à 30 degrés, bien plus froide que celle des êtres humains. Cependant, le neko n’était pas du genre à garder son sang froid, au contraire. Il était venu jusqu’ici dans le but de se battre mais, au grand déplaisir du petit mâle, les échos de guerres qu’on entendait ici et là avaient vidé le village de tous ses soldats peu avant qu’il n’arrive.

Le petit aristocrate avait à peine marché un kilomètre ou deux au calme que déjà, un cri strident troubla sa solitude. Il vit alors une bête gigantesque se poser sur le sol, non loin de lui. La tête triangulaire, quatre pattes puissantes au bout desquelles se trouvaient des griffes acérées, une longue queue qui battait l’air et surtout, des ailes d’au moins quatre mètres d’envergure. Sven recula sous le choc. Mais quelle était cette étrange créature ? Il fut encore plus surprit lorsqu’il vit descendre de l’immense animal un être humain. Celui-ci paraissait assez âgé, mais pas faible pour autant. Ses cheveux, aussi blanc que la fourrure et les cheveux du neko, dépassaient de chaque côté de son capuchon et une longue cape lui couvrait presque tout le corps. De là où il était, l’hybride ne pouvait en dire plus. C’est alors que l’homme tomba au sol. Une petite chose toute noire avec des sabres dorés en guise de bras venait de lui sauter dessus et tentait à présent d’égorger le vieil homme. Mais quel était ce monde de fou ? Il y avait apparemment ici d’autres créatures que dans le pays natal du sang noble. Et elles étaient toutes antipathiques.

Sans plus attendre, Sven courut vers la scène plutôt inhabituelle pour venir en aide à l’homme. S’arrêtant à quelques mètres à peine de la créature hostile, le jeune neko leva la main. Une pluie de stalactites pointues à souhait plongèrent sur l’odieux personnage et il fut éjecté. Le jeune mâle n’avait même pas eu besoin de prononcer d’incantation. La magie courait en lui. Depuis tout petit déjà, Sven était fier de pouvoir ainsi manier son élément à sa guise, sans avoir à être entravé par le langage. Très peu de ses congénères pouvaient se vanter de réussir un tel exploit, et encore moins chez les mineurs.
Le petit neko entendit alors une formule, se sentit projeté et retomba lourdement sur le sol. Cherchant son agresseur des yeux, il croisa les yeux de l’homme à qui il venait de porter secours. Ceux-ci lançaient des éclairs. L’homme recommença à nouveau son attaque et Sven fit carrément un vol plané. En se redressant, l’hybride matérialisa son épée double. L’homme avait déclaré la guerre, il allait voir ce qu’il allait voir… Le jeune aristocrate se précipita sur l’homme mais avant qu’il ne l’atteignit, la créature aux sabres sauta sur lui. Sven l’évita aisément ( il était bien trop rapide pour ce petit truc ;) et l’acheva d’un blizzard mordant, sans même le regarder.

Sven fit tournoyer son arme deux-trois fois. Il ne savait pas à qui il avait à faire, ni pourquoi celui qu’il avait secouru l’avait attaqué ( si c’était dû à son apparence, comment l’homme avait-il put voir à travers ses vêtements ? ), mais quelque chose lui disait que si combat il y avait, ce ne serait pas si simple. L’homme avait l’air expérimenté, ce qui manquait le plus au jeune mâle. Mais où avait-il bien put atterrir ? Des bêtes étranges, un homme qui l’attaquait sans raisons… tous avaient un point commun : ils lui étaient hostiles. Mais il ne se laisserait pas faire, foi d'Itako !

- Qui êtes vous ? Et que me voulez vous ? adressa-t-il à son agresseur. Cela vous arrive souvent d'attaquer les gens qui vous viennent en aide ? ajouta-t-il.

Le Garo était une race qui n'existait qu'à Ikana. Ce jour là, Raistlin avait pour but d'en capturer un afin de l'étudier et de mieux comprendre cette fameuse race..

Après avoir survolé un certain temps la vallée sur le dos de son fidèle dragon, Raistlin avait choisi de se poser sur un terrain fort aise au combat. A part un certain nombre de rochers qui gisaient là, il n'y avait que de la poussière.. Il le savait bien, le Garo était un être puissant, sa proie ne se laisserait pas faire comme ça, surtout s'il fallait le laisser en vie.

- Laisser un mort en vie ?

Cette phrase amusa sur le moment le nécromancien qui venait alors d'atterrir. Il souffla quelques mots à l'oreille de Fizban puis sauta au sol.
Une voix à faire frissonner le commun des mortels s'éleva alors. Dorewin félicita cette journée qui commençait bien, jamais il n'aurait cru atteindre sa proie aussi rapidement.
Il sentit alors une présence imperceptible dans son dos, une présence froide et silencieuse qui lui rappelait la mort.

- Oui...

Le Garo qui se tenait derrière lui leva alors une lame. Raistlin s'apprêta à recevoir le coup. Il n'avait pas le choix, il devrait se faire toucher mais esquiver légèrement l'arme de telle sorte à ce que la lame ne touche aucun point vital de son corps..
Soudain, l'inattendu se produisit. La créature poussa un cri de douleur après s'être fait balayer par un inconnu.

- Quoi ???

Le sorcier se retourna et reconnu un jeune homme à l'allure fort étrange.

- Non... Non ! J'étais si près du but...

Il sentit la colère monter en lui et décida de s'y laisser prendre. Il la laissa s'emparer de lui -c'était la condition nécessaire à l'usage de la magie noire- et vociféra un sort aléatoire qui s'abattit sur son ennemie. Ce dernier eut la chance de ne recevoir qu'un sort de projection basique.
Le mage rouge combattait rarement à la magie noire, seulement lorsqu'il était énervé. La colère l'empêchait généralement de se concentrer ce qui le rendait moins puissant que lorsqu'il employait la magie de sang. Tandis que dans son état normal il combattait avec grâce, rigueur, précision et muré dans un silence de concentration, lorsqu'il laissait place à la magie noire (qu'il maitrisait moins bien que la magie de sang) il se devait de crier et de libérer sa rage. Ce genre d'événement arrivait assez rarement. Dans le cas présent, l'inconnu avait généré une importante frustration chez Raistlin qui ne voyait alors plus que son adversaire.

Après avoir dégainé une arme à priori fort redoutable, l'inconnu l'interpela :

- Qui êtes vous ? Et que me voulez vous ? Cela vous arrive souvent d'attaquer les gens qui vous viennent en aide ?

En guise de réponse, Raistlin abaissa sa capuche et se mit en position de combat.

- Tu.... dois.... mourir !

Dorewin avait laissé son bâton sur son dragon. Peu importe, il n'aurait besoin ni de son arme ni de son équipier pour vaincre ce misérable..

- Lapis Insidiae !

Avec la magie noire, la voix agissait à 25% dans l'effet du sort. Plus la vélocité de la voix était forte, mieux le sort réussissait.
Une onde silencieuse parcourut la vallée avant que toutes les pierres du périmètre ne s'élèvent dans les airs.
Un rictus apparut sur le visage du sorcier qui donna alors l'ordre aux pierres de s'écraser contre son adversaire.

- N'aie crainte, la mort est plus douce que tu l'imagines..

Le sort qu'il venait de créer avait suffit à défouler sa colère. Peu importe si le petit survivrait ou pas, Dorewin l'avait déjà à moitié oublié. Il retomba dans son calme habituel et ne fit pas attention au bruit de pierres s'écrasant dans son dos. Cependant...

Sven fut horrifié en voyant toutes les pierres se diriger vers lui. Comment allait-il se débrouiller cette fois-ci ? Apparemment, l’homme ne plaisantait pas. Il ne s’agissait pas d’un rigolo de bas étage, comme le neko avait pu souvent en croiser. Cet homme utilisait des propriétés inconnues au petit Itako. Il n’était pas question d’attributs élémentaires tels que le feu, le vent ou encore l’eau… Peu importe, il fallait se sortir de ce pétrin, et vite !

Son agresseur ne se retourna même pas pour observer l’étendue des dégâts qu’il allait causer d’une seconde à l’autre. Cette totale indifférence fit bouillir de rage l’aristocrate. Cet homme était trop sûr de lui, beaucoup trop. Comme si il pouvait tuer quelqu’un de son rang aussi facilement ! Skölir…
Une défense de glace jaillit alors des mains de Sven et le protégea jusqu’au dernier moment, l’entourant complètement. Dernier moment qui était… l’explosion ! En effet, il avait réussit à concentrer tellement de rage dans sa protection qu’il avait tout fait sauter autour de lui, les pierres y comprit.
Le neko fit alors apparaître une route de glace de laquelle il glissa, afin d’arriver jusqu’à son agresseur. Ils se regardèrent droit dans les yeux un moment, sans ciller.

-Comment as-tu pu croire que je me laisserai avoir si facilement ? cracha-t-il. Alors que tu n’avais même pas utilisé d’adurna ou de brisingr ? Ne connais-tu donc pas les fondements de la magie ? ajouta-t-il d’un ton hautain.

Amateur... Sur ces paroles, l’unique descendant des Itako attaqua. Il matérialisa d’abord une aura bleue turquoise autour de lui. Maintenant que sa défense impénétrable avait été activée, l’homme aux cheveux blanc ne pourrait plus rien contre lui. Une onde de choc parcourut les environs et gela tout ce qui s’y trouvait. L’homme ne pouvait à présent plus bouger. Il était comme collé au sol, par le givre mordant du neko.
Cette onde n’avait rien à voir avec la volonté du neko. Même s’il avait apprit au fil des années à contrôler ses immenses pouvoirs, ceux-ci agissaient parfois d’eux même, quand ils sentaient une menace pesante.
Tant mieux… Ce n’en sera que plus simple. L’aristocrate matérialisa alors l’énorme bête devant l’homme. Enfin… matérialisa… à sa façon. Il s’agissait en fait d’une parfaite reproduction, sauf qu’il était fait de glace et que seul Sven pouvait le contrôler. Juste une image refaite à l'identique.

Malthinae, adressa-t-il mentalement à sa créature de glace. Celui-ci s’éleva dans les airs à l’aide de ses ailes puissantes puis revient s’écraser en piqué sur l’homme, qui avait déjà réussit on ne sait comment à se libérer de l’emprise de la glace qui le maintenait au sol. L’homme n’eut pas le temps de faire un seul geste que le double de sa monture l’enserra dans sa longue queue pour l’étouffer. Mais le véritable compagnon de l’homme se précipita sur l’être de glace. Il le lacéra jusqu’à ce que celui-ci lâche la personne âgée. S’ensuivit alors une bataille dans les airs entre l’original et son double. Les deux animaux étaient redoutables, aussi l’aristocrate parut soulagé de ne pas avoir à affronter l’un d’eux. Coups de griffes et morsures étaient rois. Le neko observa son compagnon qui était tout aussi redoutable que le véritable animal.
Cependant, celui-ci avait une faiblesse que le camp adverse n'avait apparemment pas décelé. Le clone lui ressemblait en tous points, certes. Mais seulement physiquement. A chaque fois que le petit Itako avait tenté cette expérience, il ne sentait que du vide dans la tête de la créature reproduite. Et cette fois-ci ne fit pas exception. L'être de glace n'était doté d'aucune intelligence. Seul un instinct de survie pour son maitre guidait ses pas.

Sven ne perdit pas de temps. Il se jeta, armé de son épée double, sur celui qui avait voulu le tuer. On va voir si tu es aussi bon au corps à corps qu’en magie, l’ami ! Les deux mâles roulèrent au sol. Mais le fils des Itako prit vite l’avantage de par sa jeunesse. L’homme avait peut-être plus d’expérience, mais il était apparemment moins rapide et possédait moins de force dans les bras et les jambes que le neko. Celui-ci, qui était à présent couché sur lui, approcha son arme de la gorge de son adversaire. Bien qu’âgé, l’homme força. Tout deux tremblaient, la lame s’écartant parfois un petit peu du cou de l’homme. Mais dans l’ensemble, Sven s’approchait de plus en plus. Un sourire de triomphe se dessina sur le visage de l’aristocrate quand l’homme, dans un moment de faiblesse, lâcha l’arme qui le menaçait. Le jeune mâle avait vu juste : l’homme était bien moins bon au corps à corps, certainement à cause de son âge. Il s’apprêta donc à l’achever, avec un soupir de soulagement.

Comme à son habitude, Raistlin avait employé la stratégie de l'analyse.
La contre-attaque de son adversaire l'avait certes surpris, mais cela ne l'avait pas empêché de garder la tête froide et de mettre en œuvre sa stratégie habituelle.
Son point fort physique était l'endurance, et il le fallait bien en vue de ses pratiques nécromanciennes. Les coups, les blessures, les coupures.. en cinquante ans d'expérience, il avait dépassé depuis longtemps l'étape d'insensibilisation du corps. Son adversaire se débrouillait bien pour l'âge qu'il paraissait avoir.. intéressant. Comme les anciens ennemis de Raistlin, le jeune homme opta pour le combat au corps à corps vu la carrure du sorcier. Parfait.
L'inconnu se jeta sur lui et, au terme d'une lutte inégalée, le mage noir se retrouva plaqué au sol par le garçon, s'efforçant de maintenir la lame du combattant à une distance raisonnable de sa propre personne. Le nécromancien peinait à tenir la position. L'heure n'était désormais plus à l'analyse. Tout en luttant pour entraver quelques secondes de plus la lame pointée vers lui, il prononça tant bien que mal :

- Bien... ce petit cours fut fort instructif.

La magie du Sang. Cela représentait tout aux yeux de Raistlin. Sa quête, ses valeurs, son amie de toujours, sa vie. Il avait autant voyagé dans le monde de la mort que dans celui de la vie, mais au final, peu de choses les différenciaient, mis à part sûrement la sagesse, vertu que Dorewin attribuait sans hésitations aux morts. C'est l'une des raisons expliquant la préférence du mage à fréquenter les morts plutôt que les vivants. D'ailleurs, les morts ne bavardent pas et ne sont pas embêtants, "normal" dirons-nous.. Son intérêt pour la Mort a conduit Raistlin à signer un contrat avec elle. En échange d'un certain prix fort important, le mage s'est vu offrir par la mort un pouvoir immense. Celui de faire appel à l'Autre Monde à tout moment. Bien entendu, y recourir coute cher. Et c'est bien sûr le sang, cette matière qui fait la vie, cette monnaie entre nos deux mondes, qui fait tout. C'est là que la magie du sang permet de s'élever au dessus des autres magies. La Magie Rouge liée à la Mort, voici donc la recette de Raistlin pour donner forme à son imagination morbide..

- Alea jacta est..

Ça n'était pas une formule magique, juste une expression qu'aimait bien prononcer le mage noir avant de se battre. Pour lui, le combat n'était pas obligatoire. S'il devait se battre, ça n'était généralement que par nécessité. Cette fois, il reconnaissait avoir poussé le bouchon un peu loin, mais après tout, ce petit ne serait pas du genre à arrêter le combat, la mort du garçon restait donc la seule solution admissible par Dorewin..

Le sorcier se prépara à la douleur avant de laisser la lame pénétrer sa chair. Un bruit sec, fort alléchant, se fit entendre, les deux hommes ne bougeaient plus. L'inconnu tenait toujours son arme plantée dans la côte du mage, il fixait la blessure, le sang en découlant lentement..

- Ça y est, tu m'as eu. C'est ce que tu voulais non ? Pourtant je suis toujours en vie. Cette blessure ne me tuera pas. Moi par contre, je peux toujours tuer. Achève moi.

L'inconnu fixait toujours son œuvre. Sa lame plantée dans la chair ruisselante de sang attirait toute son attention.

- ..Tu n'as pas l'habitude de tuer. Ça se voit. Tu te bats bien, tu as certainement un don, mais à quoi tout cela sert-il si tu n'as pas le cran de tuer ?

Le garçon ne dit toujours rien. Il semblait incapable de prononcer la moindre parole.

- Crois moi, j'ai vu plus de choses que bon nombre d'hommes sur cette terre, et je peux te dire qu'il te reste beaucoup à apprendre, ça en premier. Il se trouve que j'ai besoin d'une personne telle que toi pour me suivre et m'aider dans mes quêtes. La vieillesse n'est pas pour tout de suite, mais je sens bien que l'apogée de ma vie approche à sa fin. Suis moi et je ferai de toi quelqu'un de puissant.

Le sorcier était sincère dans ses propos bien qu'il décida de tuer le garçon dans le cas où celui-ci refuserait sa proposition..

Sven tomba des nues. Comment l'homme avait-il pu l'analyser en si peu de temps ? Il avait prononcé le mot juste : " puissant " . On aurait dit qu'il pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert. Le garçon resta bouche bée devant les paroles de son adversaire. Enfin, adversaire qui n'en était plus vraiment un... Sauf si le petit Itako déclinait son invitation à le rejoindre. Le laisserait-il tranquillement s'en aller dans ce cas là ? Non, certainement pas.
Mais ce ne fut pas la peur qui poussa le neko à accepter, non. Ce fut plutôt la curiosité, l'envie d'accéder à d'autres horizons qui l'enthousiasmait. Et puis, l'homme ( qui devait bien avoir plus du double de son âge... peut être même le triple, qui sait ? Tellement d'expérience se lisait dans ses yeux... ) le captivait. Sagesse… C’était le mot qui émanait de lui, d’après Sven.

Maintenant qu’il n’avait plus aucune attache familiale, il pouvait suivre l’homme en toute impunité. Quelque chose lui disait qu’il faudrait que bien du temps s’écoule avant de connaître un tant soit peu l’homme. Mais la patience n’était pas ce qui manquait le plus au jeune neko. Aussi attendrait-il aussi longtemps qu’il le faudrait.
Sven n’osa pas poser immédiatement la question qui lui trottait dans la tête depuis qu’il avait entendu parler l’homme : pourquoi avait-il besoin de lui ? Le petit aristocrate en herbe sentait que la réponse ne se limitait à ce que l’homme avait bien voulu lui dire, c’est à dire l’âge. Quelqu’un comme lui ne pouvait être entravé par le temps, c’était impossible. Le garçon hocha la tête.

- Très bien. Allons-y.

Le neko sentait qu’il n’était pas au bout de ses surprises, et que l’homme cachait encore bien des mystères. La preuve, l’homme venait à peine de jeter un coup d’œil à sa monture que celle-ci comprit visiblement ce qu’il voulait et approcha.
Mais à propos, les dragons ? Sven se retourna et vit une flaque d’eau près d’eux, qui s’évaporait peu à peu. L’être de glace n’était plus. Le monstre d’origine avait finalement trouvé le point faible de l’adversaire et l’avait réduit à néant, sans que l’aristocrate ne s’en rende compte. Décidément, tel maitre, telle bête ! Tous deux aussi surprenants.

Le petit Itako regarda avec de gros yeux la scène la plus étrange à laquelle il avait assisté de toute sa vie. L’homme posa son bâton, tout près de l’animal, qui ouvrit alors sa gueule, laissant entrevoir une rangée de dents toutes plus pointues que les autres, et souffla. Seulement, ce ne fut pas de l’air qui en sortit, mais des flammes de couleur verte qui vinrent lécher l’arme du nouveau compagnon de Sven. Celui-ci appliqua sur le champs son bâton au niveau de la plaie que le neko lui avait faite et prononça quelque chose d’inaudible. Il y eut une légère lueur verte, puis plus rien. La blessure avait disparut.
Le prince de glace fut abasourdit. L’homme était décidément très fort. Il sut alors qu’il avait fait le bon choix : avec lui, il apprendrait bien plus qu’avec n’importe qui d’autre. Ses manières étaient tellement singulières que cela plaisait au garçon. C’est alors que la question qu’il aurait du se poser bien avant sortit de sa bouche.

- Mais au fait, quel est votre nom ? Un sourire bienveillant suivit sa question, ce qui l’encouragea à poser toutes les autres qui lui venaient à l’esprit. De quelle race est votre monture ? Je n’ai jamais vu d’animal semblable. A-t-il un nom ? D’où venez vous ? En quoi consiste exactement votre magie ? Qu’…

L’homme le stoppa. Il venait de lever la main, ce qui signifiait que cela faisait trop de choses à la fois. Le neko avait conscience de paraître pour un débutant, mais il s’en moquait, à présent. Tant de questions se bousculaient à présent dans sa tête. Il voulait tout savoir de son camarade. Curieux comme un petit garçon. Mais après tout, étant donné qu’ils allaient passer pas mal de temps ensemble, il fallait bien qu’ils se connaissent un minimum, non ?
Sven attendit, silencieusement et patiemment, que son camarade entame son récit s’il y en avait un, ou au moins réponde à sa première question. La patience était une vertu, et il le savait.