L'aube de la rébéllion (Partie 2)

 Il s'avéra que le destin récompensa sa réflexion de politesse.

 Hésitant toujours à partir sur les traces de son vieil ami, l'Empereur ressentit dans son Château une magie inhabituelle. En effet, les magiciens n'étaient guère nombreux à Ikana. Et il n'avait pas de section de mage. Ce qui s'en "rapprochait" le plus correspondant aux Alchimistes. Posant une main sur la pierre froide de l'immense forteresse, il sonda plus profondément son siège. Après quelque secondes de recherche, il s'avéra que l'énergie particulière était localisée vers l'infirmerie. Là ou était Light... Un attentat? Non... On ne pénétrait pas non plus ici comme ça, pas même un mage. Mais quoi alors? Il se dirigea vers son infirmerie d'un pas preste, mais sans panique aucune. Light était magicien après tout, qui lui disait qu'il n'était pas en train de pratiquer un sort particulier pour se remettre. Ou bien qu'il neutralisait les gardes alentours...

 La porte était entrouverte quand il s'approcha et il soupira. Il avait bien précisé que personne ne devait entrer, et il n'était pas dans les habitudes des gens d'ici de laisser les portes ouvertes. Une lueur dorée filtrait par l'embrasure. Le Givré poussa la porte avec délicatesse et, avec son habituelle froideur, étudia rapidement la scène devant lui. Une vieillard cacochyme marchait péniblement, aidé courtoisement par l'un de ses gardes. Plus bas, une espèce de gosse à tête de citrouille fripée et barbue.

- On pense avoir tout vu, et pourtant le monde recèle toujours tant de surprise... pensa l'Empereur avec une forme de satisfaction.

 Il s'avança plus avant dans la pièce et lâcha d'une voix légèrement agacée.

- Pour le temps que vous aurez passés ici, vous auriez pu supporter la décoration...

 Bien qu'il ne sut absolument pas à qui il avait affaire, il s'était exprimé presque comme si ça avait été le cas. L'un de ses gardes lui fit un signe de tête entendu et il comprit qu'il ne s'était pas trompé de chambre. Il expira un long soupir qu'il ne chercha aucunement à dissimuler.

- Excusez moi, Sire.

 La pièce reprit en un instant son aspect normal. Les pupilles de l'Empereur glissèrent d'un bord à l'autre de la pièce, plus banale que jamais, avant de se recentrer rapidement sur son interlocuteur.

- Donc vous êtes réellement Light Majere? Demanda-t-il d'une voix glacée.
- En effet. Répondit le vieux mage, la voix rauque.
- Pour quelle raison devrais-je le croire?
- Demandez à vos gardes, personne n'est entrée ni sorti d'ici.
- Pourtant je vois une citrouille ici. Et vous êtes un mage puissant, je ne doute pas de vos capacités à tromper la vigilance de mes gardes. Rétorqua Ice sans craindre le moins du monde de choquer ses propres hommes, juste à coté.
- Vous avez raison. Mais peut-être puis-je vous répéter les propos de notre entretient confidentiel pour vous convaincre.
- Ce sera inutile. Je vous crois. Votre aura est similaire. Et une sensation étrange me tenaille toujours lorsqu'il se produit quelque chose d'inhabituel dans mon château, comme ce que vous aviez fait juste là.

 Le Capitaine resta muet. Il n'était en effet pas impossible que l'Empereur puisse sentir ce qu'il se passe dans sa propre région. Ses aptitudes étaient, s'il disait vrai, plutôt impressionnante. Quelqu'un a avoir avec soi plutôt que contre soi, naturellement. L'Empereur reprit la parole.

- J'ai vu Itachie, et même un émissaire d'Assilfeen. Ce que j'ai entendu me trouble. Mais me conforte néanmoins sur un point. Je ne participerai pas à cette guerre. Donnez moi votre réponse, Light Majere, Capitaine de l'Ordre de Krynn, successeur de feu l'Empire de la Lumière.
- Passe moi le sel.
- Pardon?
- Euh, excusez moi. Pour tout vous dire, mon vieillissement résulte d'une opération magique très compliquée à expliquer. Mais l'essentiel est que j'en retire une bien plus grande sagesse, au détriment vous le voyez, de mes capacités physiques.
- Et que vous édicte cette toute nouvelle sagesse, archer déchu?
- Que bien que financièrement ce soit une aubaine pour mon ordre, répondit-il sans relever le qualificatif, sans votre participation, le jeu n'en vaut pas la chandelle. Je vais rentrer chez moi et convaincre les miens de l'absurdité d'une participation à ce conflit, cela ne devrait pas être bien difficile.
- Bien. Alors nous en avons terminé.
- Pardon?
- J'ai à faire. Messieurs, continua l'Empereur en se tournant vers ses hommes, veillez à ce que nos hôtes ne manquent de rien jusqu'à ce qu'il soit prêt à repartir chez eux.

 Et il sortit en fermant doucement la porte derrière lui. Laissant le Mage et son ami orange se demandaient comment ils allaient expliquer leurs revirement de positions aux leurs.

 Une fois sorti, le Givré traversa un long couloir jusqu'à accéder à une salle où se trouvaient quelque gardes occupés à jouer aux dès. Il fit mander l'un d'eux, qui pesta, visiblement frustré de quitter une partie qu'il dominait outrageusement. Les autres semblaient au contraire ravis et le regardèrent partir avec un grand sourire. Il se présenta devant son Empereur visiblement agacé, mais néanmoins avec vivacité. Ice lui donna un petit pavé de glace dans lequel était incrusté ses inscription. Le pavé fondait toujours plus ou moins rapidement selon les ordres de l'Empereur. C'était une méthode qu'il appréciait particulièrement, et qui ne surprenait plus personne à Ikana. Le soldat prit connaissances des directives contenu dans le bloc. Elles disaient d'envoyer un message à Itachie porter les réponses d'Ikana et de Krynn. Soit leurs refus conjoint de participer à sa rébellion contre Assilfeen, mais lui souhaitait néanmoins bon courage dans sa tentative qu'ils regarderaient de loin. Étrangement, ça disait aussi d'apporter du sel à Light...

 Une fois l'homme parti, Ice soupira et se dirigea vers ses appartements ou il récupéra ce dont il avait besoin pour se lancer dans un vagabondage. Sa ceinture à laquelle étaient attachées ses quatre sacoches, ses armes et bien sur son long manteau. Il vérifia que ses sacoches contenaient tout ce qu'il fallait. Celles dédiés aux objets divers contenaient bien les billes ainsi qu'un petit tournevis amovible très pratique que ses mécanos lui avaient donné. Un masque anti poussière, aussi, Ice en avait marre de s'étouffer chaque fois qu'un affrontement soulevait un nuage de décombres. Celle médicinale contenait son lot de plante, quelque baumes et bandes et la dernière une poignée de rubis. Il n'aurait guère besoin de plus après tout. Ce petit équipement était très récent et régulièrement modifié lorsqu'il se rendait compte que quelque chose lui manquait. Il s'était promené sans rien dans son jeune temps et s'en était toujours sortit, donc...
 Il passa son manteau et agrafa la broche sous son cou. Puis se rendit aux écuries.

 Son cheval était comme toujours bouchonné et prêt à être arnaché. Une consigne qu'il avait également donné, puisqu'il pouvait partir n'importe quand. Il était très fier de cette bête qu'il avait cependant mit des lunes à dresser. Néanmoins le résultat de son labeur était au rendez vous, puisque son étalon à la robe blanche était capable de rentrer seul à Ikana d'à peu près n'importe où. Pratique dans la mesure ou le Givré devait souvent l'abandonner une fois sur place. Il scella son cheval, vérifia l'état des fontes, l'enfourcha, et s'en alla, saluant sur sa route les quelques habitants qu'il croisait d'un geste amical ou d'un léger signe de tête, sans jamais sourire.

(Ice va là)